Carnet d'une drôlesse
Bordeaux 1960-1966 — Récit Musical

Chantal Galiana, récit et Hervé Legeay, guitare manouche


Drôles

« L'éditeur Cendres, qui réédite de grands auteurs négligés (Larbaud, Schwob, Champfleury) et fabrique les livres les plus élégants de Paris, fait également paraître un ouvrage très attachant : Carnet d'une drôlesse du port de la lune par Chantal Galiana. »
Nouvel Observateur du 22 mai 2008

 

Chantal Galiana, chanteuse de poésie à Paris, a écrit un livre de souvenirs sur la ville des années soixante.
Le livre s'intitule
« carnet d'une drôlesse du port de la lune » mais c'est le sous-titre qui interpelle : Bordeaux 1960-1966.
Chantal Galiana, chanteuse de poésie à Paris, interprète de Robert Desnos, Léon-Paul Fargue et Raymond Queneau, a vécu son enfance dans le quartier du Grand Parc, plus exactement rue Lucien-Duffau, à l'angle de la rue Marsan. Dans son livre, qui est une suite d'instantanés où elle raconte ses copines, son école Montgolfier, ses lectures, son émission de télé favorite - « le théâtre de la jeunesse » - Chantal Galiana fait revivre le Bordeaux
d'autrefois, avec bien sûr une teinte de nostalgie mais sans magnifier pour autant une époque définitivement révolue.

Hervé Mathurin Sud Ouest 29 mai 2008



Chantal Galiana
Chantal Galiana raconte avec ses mots,
son Bordeaux des années 60

Je me souviens de la rue Lucien Duffau quand mon père Jeannot m’emmenait au Rialto voir les films de Joselito et que Faustain
le cordonnier espagnol m’apprenait : la boca, la nariz, los ojos...
Je me souviens qu’il m’apprenait aussi : au lycée papa, au lycée papi, au lycée Papillon… La rigolade !

 

 

Hervé LegeayHervé Legeay, l’écoute, improvise
et raconte avec sa guitare…


Quand j’écoute Carnet d’une drôlesse .....
les couleurs, les thèmes qui m’arrivent, ont quelque chose à voir
avec ce que j’appelle le blues français, avec la musique de Django,
avec aussi celle de Villa-Lobos, comme une sorte de Saudade...

 

 

 

Chantal Galiana découvre le théâtre avec Ricardo Mosner, Laurent Pelly, Philippe Adrien, Patrice Bigel... avant de se consacrer au récital, au spectacle musical.
Elle produit et adapte Brundibár, opéra pour chœur d’enfants de Hans Krasa et propose des petites formes, des duos, des « concerts salades » dans lesquels mélodie, chanson populaire, musique contemporaine, mélodrame et récit font bon ménage : Le Quatuor de Léon avec Fabrice Boulanger, La Belle saison
est proche
avec Vincent Leterme, Le Diable court dans la nuit avec Denis Chouillet.
Elle joue régulièrement à la Péniche Opéra à Paris, au Théâtre 71 à Malakoff et à la Boite à Jouer à Bordeaux… et dirige des lectures sur la mémoire avec des habitants de Malakoff et d’Ivry.
Elle produit un CD consacré à Robert Desnos : La Belle Saison est proche - 4 étoiles dans le Monde de la Musique - et écrit son Carnet d’une drôlesse du Port de la Lune - éditions des Cendres mars 2008.
Issu de la scène rock alternative des années 80 - Les Nights, les Stepping Stones - Hervé Legeay découvre la guitare avec le rock, les Stones, Led Zeppelin... Mais son intérêt pour la musique ne se limite pas à un genre et si il aime les Sex Pistols il aime aussi le jazz, la musique brésilienne, l’opéra (il a été choriste d’opéra et d’opérette) la musique classique et particulièrement Villa-Lobos.
Il passe « d’un truc à l’autre » au hasard de ses (bonnes) rencontres et joue avec Dominique Cravic et ses
Primitifs du Futur, Francis Lemarque, Françoise Kucheida, Pierre Barouh...
Il rencontre le guitariste Romane et se spécialise dans le jazz manouche.
Professeur à l'école Atla (Paris 18) il tourne avec le
septet de Romane et participe à l’enregistrement de son CD « Samois sur seine ». Il participe également à l’enregistrement de plusieurs albums avec le collectif Un Drame
Musical Instantané
/ Jean-Jacques Birgé/ Bernard Vitet et crée Merco Swing avec Fred Loizeau (guitare).
Hervé Leguay compose également des chansons pour différents interprètes. Depuis 2001 il est guitariste de Stéphane Sanseverino.


***

Extraits

Mamie est espagnole. Elle habite Bègles, la banlieue communiste de Bordeaux.
Ca tombe bien, Ida est communiste . Elle est ouvrière à l’usine de morue. Elle
travaille aux bassins.
Été comme hiver, elle patauge dans l’eau. Il n’y a qu’à regarder ses pauvres
mains toutes crevassées, rongées par le sel… Ça me donne envie de pleurer.
Et pourtant, c’est si bon la morue, surtout quand maman fait la brandade !
Un jour, elle m’a emmenée à la sècherie quai de Paludate. Là des dames, les
copines de mamie, debout devant des tables fabriquaient des boîtes pour les filets
de morue.
Je me suis installée et toute la journée, j’ai fait comme elles, j’ai plié des feuilles
de carton pour les transformer en de beaux emballages blancs et bleus. J’ai trouvé
ça formidable !
Les filles ça les a fait rire.


Evelyne Lafourcade est une fille géniale. Comme le matin elle a la flemme, elle se
prépare le soir pour le lendemain. Elle se lave, elle se fait deux nattes, elle met sa
culotte,sa robe, ses chaussettes et puis, elle va se coucher. Quand elle se réveille
elle n’a plus qu’à enfiler ses chaussures. Elle avale un verre de lait. et hop, en
route pour l’école
Sur le chemin de l’école on se pose des questions du genre :
« - Tu préférerais être naine ou bossue
- Tu préférerais qu’on te coupe un bras ou une jambe ?
- Tu préfèrerais perdre ton père ou ta mère ?
- Tu préférerais être belle et idiote ou affreuse et très très très très très
intelligente ? »
sous-entendu un homme riche, qui l’aimera toute la vie. et avec qui elle aura des
jolis enfants. Katia Duttyl, c’est un peu pareil, à part que le prince ce serait
plutôt un acteur de cinéma ou un chanteur.
Moi j’hésite toujours un peu… trois souhaits ce n’est pas beaucoup.
Il m’en faudrait… cinq ou six…


Les soirs d’été, on prend le frais. Tout le monde sort sa chaise et s’installe sur le
trottoir. Le rendez-vous c’est devant la cordonnerie : monsieur et madame Sainz,
normal ils sont chez eux, madame Bistué, la mère de madame Sainz, Danièle et
Jeannot, mes parents, monsieur et madame Delmas suivis de Totor le chien,
monsieur et madame Magnan qui ont la belle 203 noire, mademoiselle Salle
qui a été cuisinière chez François Mauriac, mademoiselle Dispanne qui
collectionne les chats et qui transporte un peu l’odeur avec elle…


Chantal Martin pleure, parce que sa mère lui a acheté un manteau avec des poils
et qu’elle ressemble à un ours.
Evelyne Lafourcade pleure, parce qu’elle a voulu se faire friser
et qu’elle ressemble à un caniche.
Katia Duttyl pleure, parce qu’elle doit jouer Arlequin
et qu’elle veut être Colombine.
Moi, je suis Polichinelle.
J’ai deux bosses, une devant, une derrière et un chapeau pointu…
Bon là, je ne pleure pas.
Mais le jour où on m’a coupé les cheveux, quand des manganes de la Cité du
Grand-Parc me traitent de : « petit drôle on va t’envoyer une mandale que tu
sauras d’où le vent il arrive ! »
Alors là moi je pleure.


Il est parti à pieds. Tout seul. Jusqu’à la gare.
Depuis Talence ça faisait une trotte…
Mais moi je ne pouvais pas l’accompagner :
la petite avait un an à peine, qui est ce qui me l’aurait gardée ?
Et puis il ne partait pas pour la guerre,
Il partait parce qu’il y avait des évènements.
Il partait pour faire la pacification.
C’est pas la guerre la pacification,
c’est même le contraire ! Non ?

 


Quatrième de couverture
« La rue Lucien-Dufau se trouve à Bordeaux entre la rue Camille-Godard et la cité du Grand-Parc. Elle donne rue Marsan, juste en face de l'épicerie Chez Cazenave. C'est là que j'habite au début des années soixante, au numéro trois… »

Chantal Galiana, que l'on connaît par ses récitals (elle a mis en musique les poètes, notamment Robert Desnos), se souvient, tout en justesse, en poésie et en musique, du Bordeaux de ses jeunes années. Une magnifique interprétation des gammes de l'enfance.

***

CARNET D’UNE DRÔLESSE DU PORT DE LA LUNE
Bordeaux 1960-1966


Éditions des Cendres Mars 2008
8, rue des Cendriers 75020 Paris
tél. : 01 43 49 31 80 ; Fax : 01 47 97 61 54


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